Ceci n’est pas un cannelé

René Magritte nous l’a appris avec son fameux tableau, les images peuvent être trompeuses. Ce ne sont donc pas vraiment des cannelés, ou pas de simples cannelés, que préparent Hélène Le Gall depuis son atelier, dans le bourg de Saint-Lumine-de-Clisson. Ce sont de véritables gourmandises au cœur desquelles se lovent la fondance des marmelades et les convictions de la pâtissière.

Les gourmandises d’Enora est le nom de l’atelier de pâtisserie, choisi par Hélène Le Gall en hommage à sa fille. Hélène s’est spécialisée dans la fabrication des cannelés… qui n’ont de cannelés que la forme. Car un pâtissier bordelais serait certainement interpellé, peut-être même vexé, de constater que la Luminaise s’est totalement réappropriée le gâteau emblématique. Chez Hélène, il s’affiche fourré à la marmelade de citron ou à la compotée de pommes, réalisé à base de farine Poulard ou de sarrasin. Véritable crime de lèse-majesté pour les uns, vrai péché de gourmandise pour les autres, ce cannelé revisité, ne laisse la place ni aux déchets ni à l’indifférence.

Partir en reportage chez « Les gourmandises d’Enora », c’est aller ailleurs qu’à l’atelier d’Hélène… En effet, rendez-vous est d’abord pris à Saint-Hilaire-de-Clisson, chez Laurent Delhommeau, éleveur de vaches laitières en agriculture biologique depuis 2017. Pourquoi là ? Parce que Hélène tient avant tout à nous montrer ce qui est au cœur de sa démarche entrepreneuriale : son engagement, son sacerdoce presque, à chercher et trouver des matières premières non seulement locales, mais également hautement qualitatives.

Nous nous retrouvons ainsi en salle de traite où Hélène vient s’approvisionner en lait. Quasiment au pis de la vache, la pâtissière prélève la quantité juste dont elle a besoin pour honorer ses commandes. Il faut dire que l’or blanc représente au moins 50% de la matière dans ses recettes. En pâturage toute l’année, et grâce à la monotraite, les vaches de Laurent produisent un lait très riche en protéines. Hélène utilise donc un lait ultra-frais, au bon goût persillé. Récupéré dans un seau réutilisable, la précieuse denrée, dans sa glacière, est acheminée jusqu’à l’atelier en vélo : oui, la « cannelière » est jusqu’au boutiste. « On peut faire autrement aujourd’hui. Je souhaite que toute ma démarche fasse sens et je ne veux en aucun cas renier mes valeurs. Deux principes me tiennent à cœur, la rencontre avec l’humain qui se cache derrière un produit et la recherche de matières nobles et qualitatives » explique-t-elle avec force et entrain, accroupie au robinet de la cuve.

Des champs de Laurent où paît une quarantaine de vaches disciplinées à l’atelier de fabrication, il y a environ 2 kilomètres. Les œufs, quant à eux, proviennent de la ferme maisdonnaise Quinenv’oeufs qui, grâce au travail de Quentin Barrault, offre un cadre de vie idyllique aux poules pondeuses, entourées d’arbres et de haies. La meule de pierre de la ferme de Népri, à Vieillevigne, s’active pour donner à la pâtissière de Saint-Lumine une farine issue de blés biologiques, quelques-uns anciens. Ainsi moulue artisanalement, le blé conserve mieux ses minéraux et ses vitamines et en est plus digeste.

C’est ainsi qu’Hélène Le Gall a patiemment su s’entourer de partenaires très locaux, voisins pourrait-on dire. Ils lui fournissent le meilleur de ces produits de première nécessité pâtissière. De ces nobles ingrédients, elle tire une gamme de gourmandises qui ne se résument pas aux seuls cannelés : elles fabriquent également des caramels, des pancakes, des marmelades, depuis récemment des amarettis… car « voyez-vous, je ne pouvais pas jeter tous les blancs d’œufs. »

Toutes les recettes d’Hélène sont le résultat d’un long travail de recherche… La pâtisserie ne s’improvise pas et elle garde secrètement ses grammages, ses temps de levage et ses dosages. « On teste, on voit ce qui fonctionne, j’ai beaucoup œuvré à réduire le sucre par exemple » raconte celle qui a, plus jeune, réalisé un cursus dans l’hôtellerie-restauration, avant de mener une première carrière dans la gestion des ressources humaines au sein de palaces hôteliers. Il y a sept ans, elle fait un cannelé fourré au chocolat et c’est un peu le déclic : « j’adore ce gâteau et je trouvais dommage de le laisser dans sa composition traditionnelle alors qu’il y avait un potentiel gustatif évident ! » La pâtissière a donc mis au point ses recettes avec l’objectif d’offrir trois textures en bouche : du craquant, grâce à la croûte que les moules en cuivre, très conducteurs de chaleur, favorise ; du fondant, grâce aux marmelades et caramels nichés au cœur du gâteau ; de la fraîcheur et du peps, grâce aux ingrédients scrupuleusement choisis pour leur saveur comme le citron, la pomme, le sarrasin.

Donnant de notre personne, nous avons goûté lors d’une dégustation un peu ritualisée, découvrant les différents cannelés dans un ordre précis, selon leurs saveurs… car autant le dire, ces cannelés se savourent avant de se dévorer. Le pari est complètement réussi : la surprise est au rendez-vous quand, une fois la coque cassée, l’on découvre le cœur, dont la marmelade se mêle au goût du rhum, subtilement. Une fois que l’on y a goûté, on est de ceux qui peuvent affirmer : « il y a les cannelés et il y a les cannelés d’Hélène. » Comprenez que ces gourmandises ont le goût du lait de Laurent, la couleur des œufs de Quentin et la saveur des blés de Didier… Hélène Le Gall a su créer un produit à son image, éthique, gourmand et sain tout en inventant un gâteau de terroir et de territoire, signature pâtissière de notre Vignoble nantais paysan. Essayer un « cannelé d’Hélène », c’est faire d’un moment gourmand une véritable Madeleine de Proust.

Si vous en avez l’eau à la bouche, offrez-vous un coffret : sur le site de vente en ligne, il y en a pour tous les goûts, que vous soyez plutôt chocolat ou agrumes. Ou bien, à l’occasion d’un événement familial ou d’entreprise, glissez l’idée d’offrir aux convives quelques cannelés, vous serez remerciés pour cette initiative gourmande. En bonus d’ailleurs, faites appel à Hélène pour l’ensemble de la prestation car elle propose aussi ses services comme traiteur.